En janvier 1997, l’université McGill a tenu un grand colloque sur les suites du rapport de la Commission royale sur les peuples autochtones (CRPA). Deux mois à peine après le dépôt du
rapport final, les sentiments étaient partagés. D’une part, certains intervenants sociaux et politiques entretenaient l’espoir que le gouvernement fédéral mettrait en œuvre la majeure partie des recommandations de la Commission, permettant ainsi le renouvellement de la relation entre l’État canadien et les peuples autochtones, tel que le recommandait la
Commission. D’autre part, on sentait chez d’autres intervenants (autochtones ou non) une critique assez forte du rapport.
Dix ans plus tard, force nous est de reconnaître que les espoirs des premiers ne se sont jamais concrétisés. D’abord, le gouvernement fédéral a mis dix-huit mois pour répondre au rapport de la Commission, une réponse qui fut somme toute assez timide. Ensuite, on n’a jamais entrepris le grand projet de renouvellement de la relation que recommandait la Commission. Ce projet devait inclure, entre autres choses, une refonte du ministère des Affaires indiennes et du Nord, le développement de nouveaux processus de négociation des traités, l’abolition de la Loi sur les Indiens et l’adoption d’une nouvelle Proclamation reconnaissant les principes fondamentaux du renouveau de la relation entre autochtones et Canadiens (Canada 1996, vol. 1).
Il n’est pas surprenant que le gouvernement fédéral ne se soit pas empressé d’intégrer les travaux et les recommandations de la CRPA dans une nouvelle approche des politiques autochtones,
puisque « c’est le sort de maintes commissions d’enquête » (Forest 1998 : 286); il ne faut pas croire, cependant, qu’il ait systématiquement ignoré les recommandations de la Commission. Bien au contraire, cet article va démontrer que, pour inclure les recommandations de la CRPA dans ses politiques autochtones, le gouvernement fédéral a développé une approche particulière, que nous désignerons comme une stratégie en parallèle.
Deux raisons expliquent que le gouvernement fédéral ait opté pour une stratégie en parallèle. D’abord, lors du dépôt du rapport final, les recommandations de la Commission s’inscrivaient en faux contre le contexte politique et économique de l’époque, ce qui n’a pas permis aux recommandations de gagner l’aval des décideurs publics. Ensuite, les autochtones ont eux-mêmes grandement critiqué à la fois les travaux et les recommandations de la CRPA, ce qui n’a pas non plus encouragé le gouvernement à mettre en place un grand projet de renouvellement de la relation entre autochtones et Canadiens.
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